Puisque nous parlons de délit d’initié – quelques news de NY

Posté le 9 avril, 2014 dans finance / eco

Normal que nous en parlions à et depuis New-York – puisque c’est un des plus importants centre financier et de bourses de valeurs du monde. Et ce blog a souvent parlé de ce sujet. Outre son intérêt – enfin – pour le flash trading [et, breaking news, après le procureur et le FBI, le DoJ s’y met également], le procureur Preet Bharara y affiche un score impressionnant de 79 condamnations sur 79 poursuites – depuis que son parquet s’est ré-intéressé à ce problème dès 2009. Tous les délits ont leurs phases, passent de priorité à l’arrière-plan et vice-versa en fonction des « tendances » judiciaires du moment. Le délit d’initié, pour les anciens, c’est le Wall Street de Michael Douglas des années 80, avec une série de condamnations emblématiques des Boesky et autres Milken. Elles avaient mis fin à une certaine impunité matérielle et constitué une dissuasion pendant un certain nombre d’années. Après une pause dans la détection et la répression de ces délits sauf quelques cas anecdotiques, Bharara a mis à jour plusieurs affaires impliquant des hedge funds et des systèmes plus ou moins organisés de remontées de tuyaux via des analystes insiders, soit plusieurs situations de typologie différente mais impliquant l’exploitation illicite de données non-publiques ayant entraîné un avantage financier. Les affaires Rajaratnam, Gupta et SAC Capital ont montré que les gros poissons ne passaient pas entre les mailles du filet – avec des peines allant jusqu’à 11 ans de prison pour Rajaratnam. Plusieurs éléments sont intéressants dans ce contexte. 

Intéressant ainsi que, dans les causes qu’il a poursuivies, il soit arrivé à un tel score de 79 condamnations ou guilty pleas sur 79, signifiant que le jury l’a suivi à 100% dans les cas de procès. Cela démontre que le parquet est capable, ce qui est loin d’être évident pour des infractions fondées sur la confidence et le secret, puis sur leur concrétisation dans des transactions noyées dans les volumes des marchés, d’en établir la preuve – l’écueil essentiel pour ce délit. Intéressant que les coupables soient davantage confondus par des moyens traditionnels – écoutes, emails et dénonciations – que par des recoupements informatiques de données de marchés. Cela est probablement logique et quelque part rassurant, le pacte scélérat qu’implique le délit d’initié étant, comme toujours et par définition, fragile. Intéressante la confirmation de la condamnation de Rajat Gupta, le plus haut gradé à avoir été attrapé, par la Cour d’Appel du 2ème Circuit. Par 3-0 elle a validé la constatation de fait qu’il y avait les preuves de communications illicites. La condamnation de Gupta est intéressante et cruciale parce qu’elle se situe à board room level, qu’elle n’est donc pas le fait de seconds couteaux, et que par des écoutes « traditionnelles », elle a appréhendé l’élément diffus, immatériel, difficile à constater : le tuyau lui-même, la simple phrase, à mots voilés « qu’il allait se passer quelque chose de bien » – fondé sur la connaissance d’un fait confidentiel, soit que Warren Buffet allait investir 5 milliards dans Goldman Sachs.

Intéressant aussi que ces condamnations ne visent plus comme cela a souvent été le cas des small time crooks pour des petits montants. Dans le cas de SAC Capital, c’était un système avec de nombreux participants et des pénalités ont été prononcées pour 1,2 milliards, plusieurs dizaines de millions dans les autres cas. Intéressant enfin la mise à jour tout récemment d’un nouveau cas impliquant la remise de l’information comme au bon vieux temps quasiment par chuchotement dans un lieu public anonyme et bondé, la gare Grand Central à New-York. Les rencontres étaient arrangées par sms – mais l’information montrée subrepticement sur un bout de papier qui était ensuite avalé. En d’autres occasions l’un des participants montrait simplement une fraction de seconde le symbole du titre concerné affiché sur son smartphone. Et comme souvent les transactions étaient couvertes par de la recherche servant de prétexte. Intéressant que dans ce cas comme dans un précédent ayant tenu 17 ans, l’information ait été extraite, illicitement, d’une Etude d’avocats. Et la Suisse ? C’est un pays et des marchés vertueux : il n’y a pas de délits d’initiés. Passez votre chemin.

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