LE DÉSASTRE JUDICIAIRE VAUDOIS DE LA POURSUITE DES MANIFESTANTS DE LA GRÈVE DU CLIMAT DE 2019

Posté le 4 juillet, 2024 dans divers

Dans l’autopsie des procès des citoyens ayant manifesté pacifiquement sans autorisation à Lausanne en 2019 lors de la Grève mondiale pour le climat (avec leur remarquable collectif de défense Procès des 200), deux juges vaudois viennent de livrer deux contributions juridiques sur les limites du droit de manifester, notamment sans autorisation. Un cri de défense – tant la justice vaudoise n’a pas eu l’habitude d’être confrontée à la CEDH invoquée par les manifestants poursuivis ? Un cri de victoire – l’ordre est sauf ? Et de conclure, ou plutôt titrer, « est-ce que la fin du monde justifie les moyens ? ». Très drôle et ouf, l’ordre est sauf. Sauf que.

Ces procès ne sont pas tous terminés – valant motif de récusation puisque la conclusion, de l’une plus que de l’autre, est celle de la répression. Et c’est la CEDH qui aura le dernier mot – dans quelques années et qui risque bien de secouer ces convictions. Surtout, la docte analyse du fond faillit à masquer le véritable désastre judiciaire qu’a constitué la poursuite mal inspirée des manifestants par le Ministère public, sur lequel une commission parlementaire se penchera peut-être un jour : des dizaines de jours-audience et un travail de fou pour le Tribunal de police, causant retard et délais à tout son rôle, des jugements tous condamnatoires mais motivés de manière disparate et prononçant des peines variant du simple au double, les arrêts de la Cour d’appel pénale portés au TF tous cassés, oui tous, soit 35 arrêts du TF concernant 51 prévenus à ce jour, pour d’alarmantes violations de la procédure, du droit à la preuve, défaut de motivation et mauvaise application du droit matériel, imposant de nouvelles audiences près de cinq ans après les faits pour des préventions dérisoires face à l’enjeu dénoncé.

Tout ça pour ça alors que ces manifestations ont indéniablement fait évoluer la société civile et les pouvoirs publics sur cet enjeu climatique. Le pire est bien là : la satisfaction du devoir accompli d’avoir sanctionné une entrave à la circulation et un refus d’obtempérer – l’ordre est sauf – alors que nos concitoyens exprimaient l’urgence face au péril le plus grave pour l’humanité depuis l’avènement de la civilisation. Et envers lequel l’inaction est actée. Poursuivre le doigt plutôt que ce sur quoi il pointe. Facile. Pratique. Circulez. La fin du monde ne justifie pas les moyens ? Ceux d’exercer quelques heures le droit constitutionnel de manifester sur la voie publique pour tenter d’y échapper, à la fin du monde ? Qu’en 2024, à Lausanne, les trolleybus et les ordres de la police l’emportent toujours sur un droit fondamental exercé à cette fin ne prouve qu’une chose : on n’a toujours rien compris et la lutte doit continuer. Merci au Ministère public d’avoir offert cette tribune à la cause climatique. On avait dit dérisoire ?

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