
Rédiger des écritures judiciaires convaincantes – pour gagner en justice : The same old story so far mais quelques nouveaux livres
L’avocat et son client veulent gagner en justice. L’écrit a pris aujourd’hui une part prépondérante dans de nombreux types de procédures – mais l’avocat reste fréquemment ignorant des règles d’écriture qui permettent d’optimiser le caractère convaincant d’un texte. L’avocat est formé à ce que sa rédaction respecte les exigences fixées par la procédure. Rarement ou pas du tout formé en rhétorique – écrite. C’était le sens de mon livre « Etre efficace en Justice » publié en 2011 chez Schulthess et LGDJ. Ce sujet est peu traité dans la littérature francophone – mais plus abondamment dans la littérature et les études de droit anglophones. Ainsi l’édition révisée de 2012 du « Writing to Win » de Steven D. Stark. Typique « How-To » book à l’américaine, il expose des grilles et principes universels et intemporels, des écritures judiciaires aux contrats, des courriers aux emails et affidavits. Il identifie les pièges et les erreurs. Et rappelle des principes essentiels :
« Make it interesting », « Don’t overargue », « Most writing difficulties are organizational difficulties » – signifiant que le rédacteur ne maîtrise pas sa matière et ses preuves. Eliminer le jargon et faire court et simple. Exploiter la sémantique. Utiliser le langage courant plutôt que la phraséologie juridique, que 55 à 83% des juges préfèrent selon les juridictions. Il y a des conseils en matière de caractère typologique, de processus de rédaction, de ton, de forme de la narration, de structure de l’argumentation judiciaire écrite. Et bien sûr « be accurate ». Excellent donc et avec comme conclusion un intéressant chapitre « The Real Damage of Bad Legal Writing ». La bibliographie est importante – prouvant par-là l’importance du sujet aux Etats-Unis.
Un second ouvrage « Point Made: How to Write Like the Nation’s Top Advocates », de 2011, par Ross Guberman, est davantage tourné sur la pratique et les exemples. L’ouverture qui explique la totalité du litige et son thème au juge en 60 secondes. La structure et le langage. In fine les mêmes sujets bien sûr mais sur un mode exemplatif citant les meilleurs avocats, les plaidoiries et les jugements célèbres, bref, la réalité – que chaque avocat devra affronter dans ses propres affaires quelles qu’elles soient. Curieux que chez nous tout cela soit empirique et que la profession pense de manière générale que dire par écrit son raisonnement ou ses arguments suffit. Tel n’est assurément pas le cas.
« Point Made » est un ouvrage fantastique pour la pratique quotidienne de l’avocat. Par rapport à la pratique suisse, j’ai compris plusieurs éléments dont, notamment, l’utilité d’un résumé de l’argumentation, l’importance des sous-titres dans les faits, etc.
Bien écrire n’est peut-être pas suffisant — le plaisir visuel compte également. Je me permets de vous soumettre « Typography for Lawyers », un très beau livre à ce sujet.
De manière générale, ce style de livre ne sert qu’aux personnes prêtes à chambouler les habitudes…