
Madoff update : Clawbacks, Rico et Common Law Claims – bientôt fixés sur les questions de principe qui détermineront le dividende
La myriade de procédures se poursuivant dans l’affaire Madoff, tout cela dans le sens de la proche clarté sur la manière dont elle sera résolue, il est temps de refaire un point (cf. le dernier ici). Dans les procédures principales, soit celles du trustee Picard contre plusieurs deep pockets, lesquelles auront un impact important sur le dividende qu’il distribuera aux victimes, il fait appel devant la Cour d’appel du 2ème circuit à New York des deux jugements du 1er novembre 2011 rejetant ses common law claims, et le confinant donc à des prétentions du droit de la faillite (soit essentiellement les clawbacks), contre UBS et. al. et JPMorgan Chase et. al. Il fait également appel des deux jugements du 28 juillet 2011 rejetant ses common law claims contre HSBC et. al. et Unicredit et. al. Enfin, son action fondée sur le Rico Act contre Unicredit et al. pour USD 59 milliards a également été dismissed par le juge Rakoff, le juge qui lui a déjà flingué ses common law claims et l’étendue de ses clawbacks. Un appel vient d’être annoncé – mais dans lequel sa position sera plus difficile encore s’agissant de prétentions Rico. La messe sera donc dite sur ce que Picard pourra récupérer lorsque la Cour d’appel aura statué sur ces problèmes de principes. Picard souhaite bloquer la faculté des lésés de réclamer eux-mêmes des dommages intérêts (les common law claims) aux prestataires qu’il attaque. Pour lui, seule la masse en faillite le peut – pour des raisons d’équité et d’égalité dans la redistribution. De tels procès ont été introduits par des investisseurs contre JPMorgan Chase en tant que banque de Madoff ou contre Bank of New York Mellon en tant que banque dépositaire du fonds Rye – sans compter les procès similaires en Europe.
Pour certains, il y a toutefois un obstacle juridique sur ce dernier point. Agissant pour le compte de la faillite du fraudeur, il ne peut pas, en raison de la clean hands doctrine, rechercher d’autres contributeurs du dommage. A suivre donc. Reste encore la question importante des clawbacks. La décision du juge Rakoff dans l’affaire des « Mets » de les limiter à deux ans et aux profits fictifs peut « coûter » 8,2 milliards à la masse en faillite. Picard a demandé à faire appel tout de suite. Cela lui a toutefois été refusé par le juge au motif qu’il n’y avait pas de raison de faire une exception au principe selon lequel l’appel doit être dirigé contre le jugement de fond à la fin de la procédure de première instance. Le jury trial devait donc avoir lieu et commencer le 19 mars pour une dizaine de jours. Pour rappel, le juge Rakoff avait jugé que les défendeurs devaient restituer $ 83 millions au titre des profits fictifs, renvoyé devant le jury la question de leur wilfull blindness auquel cas ils devraient rendre $ 303 millions en capital investi et retiré, exprimé son scepticisme que cette mauvaise foi puisse être démontrée, et rejeté le solde des prétentions du trustee totalisant $ 1 milliard. Ce procès devait être passionnant, par l’appréciation par un jury des red flags dont les défendeurs auraient dû s’apercevoir, concrets et accablants pour Picard (cf. son site). Et cette problématique des red flags et de la négligence consciente étant sous-jacente à une large majorité des procès Madoff en responsabilité. Mais ce procès n’aura pas lieu car Picard et les défendeurs ont transigé à quelques heures de son début.
Selon l’accord les défendeurs restituent $ 162 millions de profits fictifs retirés sur six ans, incluant donc les $ 83 millions sur deux ans auxquels ils étaient déjà condamnés. Le trustee reconnaît leur absence de mauvaise foi – ce qui ne sert qu’à abandonner sa prétention initiale en restitution du capital investi retiré. Cette dette de $ 162 millions envers BMIS sera compensée avec leur dividende sur leur production admise de $ 178 millions correspondant à leur net loss. L’exigibilité est reportée de trois ans contre une garantie personnelle de MM. Katz et Wilpon de $ 29 millions – soit le temps de déterminer ce dividende. Le trustee « récupère » donc comptablement $ 162 millions de clawback contre le dividende sur $ 178 millions. Mauvais accord pour BMIS ? Cela dépendait des chances de Picard de faire établir la wilfull blindness par le jury pour les 300 millions en principal, et/ou de gagner en appel contre la limitation du clawback à deux ans pour obtenir plus que $ 83 millions. Cet accord laisse ainsi ouverte la question de savoir si le clawback s’exerce sur deux ou six ans – Picard conservant ses options sur ce point. Si le jugement limitant le clawback à deux ans était confirmé, la famille Madoff conservait $ 82 millions de profits illicites. Même si c’est la loi, ce serait malvenu et mal pris. Dernière anecdote, les défendeurs entendaient plaider que si la fraude était si facile à détecter, le trustee n’aurait pas eu à encourir $ 214 millions de frais d’avocats en trois ans. Ce n’est qu’un argument mais parce qu’il frappe l’imagination, le trustee entendait empêcher qu’il soit formulé. La suite au prochain numéro.