
Cacophonie bancaire – et de l’inique et dangereuse action de certaines banques de transmettre les noms de leurs employés aux autorités américaines
Ainsi Nicolas Pictet râle-t-il pour les banques privées contre la Finma laquelle ne sauvegarderait pas suffisamment les conditions cadres du secteur. Mais avec l’ennui que cette posture a ses limites. Le régulateur n’a pas pour mission première de protéger l’activité économique en elle-même. Privés ou non, les banquiers ont largement perdu par leurs errements leur légitimité à réclamer. Le secteur bancaire compte encore pour une large part des emplois, du PIB et des rentrées fiscales – mais la finance a mené le monde au bord du gouffre avec sauvetage payé par tous à la clé et la banque privée a sabordé elle-même son modèle d’affaires en violant allègrement les accords QI, en pratiquant une activité cross-boarder qui ne pouvait pas ne pas poser problème et en étant incapable d’anticipation. La banque privée a gagné indécemment sa vie entre 2000 et 2010 alors que leurs clients finissaient au mieux flat sur la décennie. Pour une industrie qui finalement place et joue à son profit avec le capital des autres, euphémisme de dire que les appels tels que celui de l’ABPS ont épuisé leur capital sympathie. Ce qui ne fait que se greffer sur la cacophonie sur Rubik et sur l’hypocrisie de la division entre un monde OCDE surveillé fiscalement et le reste dans lequel l’évasion fiscale profite encore aux élites politiques et économiques (cf. ce blog). A cela s’ajoute le fait – inique et idiot, et peut-être même pénal – de donner aux Etats-Unis les noms des employés ayant eu à traiter avec des clients américains. Cela choque car lâche et idiot tout d’abord : idiot – car que pourra bien dire un employé lambda s’il est interrogé par des enquêteurs américains ?
La vérité : que sa banque voulait du chiffre, violait délibérément l’accord QI (avec pour certaines la bénédiction mal inspirée d’un grand cabinet d’avocats américain en Suisse), les noms de ses supérieurs et hauts dirigeants, le manuel et instructions cross-boarder, etc. Lâche ensuite car ce problème d’une industrie toute entière et de certaines banques en particuliers dépasse en termes de responsabilité et d’enjeu la simple identité des dix-mille (?) employés donnés ainsi ayant eu, souvent sans l’avoir décidé, à servir des clients américains. Et pénal peut-être même – puisque plainte a été déposée auprès du MPC pour violation du secret bancaire et actes effectués sans droit au profit d’un Etat étranger/espionnage économique – les célèbres mais inusités art. 271 et 273 CP. Sans immense analyse cela ne semble pas d’entrée farfelu – et si le MPC s’avère à l’usage aussi indépendant que l’a affirmé son chef, il pourra y avoir là une situation aussi intéressante que l’ouverture de poursuites contre des agents du fisc allemand. Comprenons-nous bien : la problématique est vaste et ne se résout pas en une simple équation manichéenne. La banque suisse doit se réinventer, deviner et anticiper la gestion d’actifs de demain. Sereinement, objectivement, sans velléitarisme ni arrogance. Elle doit aider le gouvernement et le législateur à définir les conditions cadres vendables économiquement et politiquement de demain. De notables les banquiers sont en peu de temps devenus des receleurs n’osant plus même partir en vacances au Grand Canyon ou à Berlin. Sale temps pour les mouettes et qu’ils le fassent un peu oublier.